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Comment adapter nos forêts au réchauffement climatique
Les experts ont récemment tiré la sonnette d’alarme : nos forêts ont réduit de près de 40 % leur capacité à absorber le CO2. Pas de panique pour autant ! À l’occasion de la Journée internationale des forêts, le 21 mars, on fait le point sur le sujet...

La France s’est longtemps crue bien lotie en matière de forêts. Avec 17,2 millions d’hectares, elle possède l’une des plus grandes surfaces forestières d’Europe - elle se classe au 4e rang européen derrière la Suède, la Finlande et l’Espagne, selon Eurostat. Et son couvert forestier (31 % du territoire) a progressé de 3,3 millions d’hectares depuis 1985 d’après l’IGN - l’équivalent de la région Pays de la Loire - un record après l’Espagne !
Des puits de carbone indispensables
Une excellente nouvelle quand on sait ce que les forêts représentent : des havres de paix bien sûr, mais aussi des réservoirs de biodiversité, des boucliers contre l’érosion des sols et, surtout, des puits de carbone qui permettent de lutter contre le réchauffement climatique (seuls les océans font mieux). Au total, notre filière forêt-bois permet de compenser 20 % de nos émissions de CO2.« Sans ces puits de carbone, c’est impossible d’atteindre la neutralité carbone », alerte le chercheur François Gemenne.
La mortalité des arbres a doublé
Le réchauffement climatique met toutefois nos forêts à rude épreuve. Jusqu’ici, les arbres s’adaptaient en colonisant des espaces moins secs grâce à la dispersion des graines. Après la dernière glaciation, il y a 13 000 ans, les chênes ont mis 6 000 ans pour reconquérir l’Europe ! Mais la hausse de températures est aujourd’hui trop rapide pour permettre cette migration naturelle. Déshydratés par les canicules, les arbres sont plus vulnérables aux incendies et aux parasites (scolytes, chenilles processionnaires..).
Résultat : leur mortalité a doublé en une décennie. Depuis la canicule de 2018, la superficie dépérissante est passée de 300 000 hectares à un million, un accroissement équivalent à… 70 fois Paris ! Et le chiffre pourrait doubler d’ici dix ans. La conséquence ? Nos forêts ont absorbé quasi 40 % de CO2 en moins sur 2014-2022, comparé à la période 2005-2013, selon l’IGN.
Heureusement, face à ce déclin, chercheurs et forestiers se mobilisent. Parmi eux, l’ingénieur Erwin Ulrich, qui pilote la mission « Adaptation des forêts au changement climatique » de l’ONF (Office nationale des forêts). Nous l’avons interrogé pour en savoir plus.
« Nous testons des essences espagnoles, et ça marche ! »
Comment est né le « plan d’adaptation des forêts » de l’ONF ?
Erwin Ulrich : Le dépérissement de 670 000 hectares de forêts depuis 2018 a été un vrai électrochoc. On a compris que les forêts ne pourraient plus s’adapter seules au climat, qu’il fallait agir vite, au risque de les voir disparaître ! D’où cette mission, née en 2020, qui aide les forestiers à identifier les essences résilientes.
Quelles solutions testez-vous ?
Notre mot d’ordre est « diversité », car une forêt variée résiste mieux. Avec le concept des « forêts mosaïques », on privilégie la régénération naturelle. Et quand certaines essences souffrent, on introduit des essences plus adaptées du Sud de la France. Là où on plantait une essence, on en met trois ou quatre. 50 millions d’arbres ont déjà été plantés, mais il en faudra bien plus ! Le niveau de régénération spontanée des forêts est, en effet, passé de 80 % en 2022 à 63 % 2025, et descendra probablement à 50 % dans les années à venir !
D’autres expérimentations sont-elles en cours ?
Il existe, aux Etats-unis, dans le Maghreb ou en Espagne, des arbres qui connaissent déjà notre futur climat dans 50 ou 100 ans. À terme, ces variétés pourraient prendre le relai des arbres sensibles dans l’Hexagone. Nous testons actuellement des essences espagnoles sur 525 « îlots d’avenir » (2 hectares), et ça marche ! 90 % des chênes de Hongrie et des hêtres d’Orient plantés il y a deux ans en Ile-de-France ont repris. Ils pourraient remplacer un jour, respectivement, le chêne pédonculé et le hêtre commun. Mais il faudra 30 à 50 ans pour savoir si on adopte ces nouvelles essences. Les bouleversements sont rapides, mais on s’y prépare !
Trois idées pour (re)découvrir nos forêts
Participez au festival « Forêts en Scène », du 15 au 23 mars. Organisé par l’ONF à l’occasion de la journée internationale des forêts le 21 mars, l’événement rassemble 200 animations partout en France. Plus d’infos ici.
Testez Espéride, le premier serious game sur les effets du changement climatique (en ligne ou sous forme d’appli), créé par l’ONF et la région Nouvelle Aquitaine. Dans la peau d'un forestier, relevez le défi de sauver la forêt en prenant des décisions stratégiques.
Téléchargez l’appli « Clés de forêt ». Quizz, enquêtes, secrets… Un outil ludique de l’ONF pour identifier empreintes, arbres et animaux.
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